Ses 90.000 m3 d’eau vidés, le canal Saint-Martin prend soudain des airs de désolation. Des plages de vases font surface. Avec l’odeur qui va avec. Avec surtout d’innombrables déchets répandus sur près de 4,5km. On croirait voir là un village subaquatique déserté que des archéologues auraient mis au jour. Il n’en est rien. Cette vue édifiante d’un des spots habituellement les plus agréables et recherchés de la capitale est bien la conséquence d’actes quotidiens, d’objets abandonnés, jetés ou tombés au gré des années, de pique-nique estivaux et de soirées épiques.
Depuis le 4 janvier et jusqu’en avril, les agents de la ville de Paris entreprennent le nettoyage et la remise en état du site. Une telle opération d’entretien n’avait pas été menée depuis 2001. Cette année, la municipalité s’attend à collecter près de 40 tonnes de déchets, vase comprise, dont une partie doit être recyclée ou revalorisée. Mais la pollution a déjà fait son oeuvre. Les huiles et carburants échappés d’une dizaine de scooters et motos se sont depuis bien longtemps déversés dans le milieu. Sans parler de nombreux objets plastique et électroniques dont les composants se désagrègent dans l’eau.
On compte également une centaine de Vélib et autant d’autres vélos. L’antenne locale de Paris a par ailleurs constaté la présence de poussettes, de chariots de supermarché, de l’électroménager, des chaises, du mobilier urbain telles que poubelles et barrières de chantier, des sacs plastiques, des centaines de canettes de bière – en verre ou en métal – tapissant littéralement le fond du canal… Tout semble bon s’y déverser. Pourtant, aucune de ses épaves n’a vocation à s’y retrouver. Et encore moins à devenir le décor familier de poissons.
En mai dernier, lors de son Initiative Océane 2015, Surfrider Paris avait sensibilisé les usagers des lieux quant aux déchets laissés derrière eux sur les berges. Ces derniers ne peuvent que finir à l’eau quand ils ne sont pas ramassés et recueillis dans les poubelles voisines. Nous en avons ici une malheureuse et choquante illustration. Conjugués aux incivilités semblant sans incidence, ces oublis ou jets dans le canal conduisent pourtant celui-ci dans une bien mauvaise passe environnementale.
Cédric, Surfrider Antenne Paris