Depuis plusieurs années Surfrider souhaitait étudier le bassin versant d’une rivière afin de mieux comprendre les origines et les impacts des déchets. Ce projet va voir le jour grâce à un partenariat mis en place en octobre 2013 avec HSBC France. Travaillant sur de nombreux projets environnementaux avec différentes associations, HSBC France a rapidement compris l’importance et la pertinence de travailler sur un tel projet. Une étude du bassin versant de l’Adour sera ainsi mise en place dans les semaines à venir. Cristina Barreau, chargée du programme déchets aquatiques à Surfrider Foundation Europe nous en dit plus sur ce projet :
Peux-tu nous présenter le projet « Riverine input »et ses objectifs ?
80% des déchets sont d’origine continentale mais nous avons très peu d’idées sur les sources, les quantités et pourquoi ces déchets se retrouvent dans les rivières et les cours d’eau. En effet, Il existe très peu de recherches faites sur cette problématique, sans compter sur le fait que les textes réglementant les rivières ne considèrent pas les déchets comme un indicateur de la qualité de l’eau des rivières. Il nous paraissait donc intéressant de quantifier scientifiquement ces déchets et d’étudier également leur impact sur l’environnement. Nous avons choisi de commencer par une étude du bassin versant de l’Adour qui est un très bon exemple de bassin versant, puisqu’il prend sa source en montagne, traverse des villes et des villages où se trouvent des exploitations agricoles, pour se jeter dans l’océan au niveau de la Barre à Anglet.
L’objectif sur le long terme est de pouvoir remonter aux origines, comprendre les sources de ces déchets et ainsi influencer les décideurs publics en leur proposant des mesures concrètes et adaptées pour lutter contre cette source de pollution. Nous espérons aussi dans l’avenir, dupliquer ce protocole sur d’autres cours d’eau plus grands et sur d’autre façade maritime pour élargir nos connaissances, les sources et origines des déchets étant différentes selon les façades.
Quelles sont les différentes étapes de ce projet, comment va-t-il se mettre en place sur le terrain ?
La première étape est de déterminer un protocole de quantification des déchets que nous appliquerons sur le bassin versant de l’Adour. Il existe de nombreux protocoles scientifiques concernant les déchets marins mais aucun pour les déchets retrouvés sur les berges des rivières. Nous avons déjà rassemblé des textes scientifiques, interviewé des scientifiques spécialistes de la problématique des déchets aquatiques, des associations, mais aussi des personnes connaissant le bassin versant de l’Adour. En nous entourant de l’ensemble des acteurs concernés, nous cherchons ainsi à mettre en place un protocole scientifique pertinent que nous espérons pouvoir tester pour la première fois en janvier. Concrètement il y aura 4 points de prélèvements sur lesquels seront appliqués ce protocole et qui nous permettront, suite à l’examen des données d’obtenir des résultats scientifiques avérés sur la quantité, le type et les sources des déchets retrouvés.
Pour cela il nous parait essentiel de travailler en collaboration avec tous les acteurs de l’eau de la rivière Adour, aussi bien les communes, que les syndicats de rivières, que l’Agence de l’eau. Nous ferons également intervenir des bénévoles que nous allons former pour mettre en place des collectes de déchets, une fois que les 4 points de prélèvements seront choisis. Nous souhaitons également impliquer des pratiquants d’activités en eaux vives qui connaissent aussi très bien leur rivière ainsi que des pêcheurs. Il s’agit vraiment de fédérer l’ensemble des acteurs concernés par cette problématique afin de travailler ensemble pour trouver des solutions.
Quelles sont les attentes sur le long terme de ce projet ?
Forcément c’est un projet qui se fera sur le long terme. Il nous faudra minimum trois années avant d’avoir des données vraiment importantes et scientifiquement prouvées. Au cours de la première année, nous pourrons néanmoins déterminer des grandes tendances qui seront avérées au bout de deux ou trois ans.
Une fois ses données établies, nous les partagerons avec la communauté scientifique. Nous avons d’ores et déjà pris contact avec des scientifiques de renoms, ainsi qu’avec des personnes qui travaillent sur des rivières (syndicats de bassin versant, associations, scientifiques…). Nous porterons également cette étude au niveau de l’Union Européenne une fois qu’elle sera finie, cela peut les intéresser dans le cadre de la Directive Cadre Stratégie Milieu Marin, de voir les apports des déchets par les rivières mais aussi pour pointer du doigt le fait que la Directive Cadre Eau actuelle ne prend pas en compte les déchets comme un indicateur du bon état écologique des eaux alors que ces déchets ont des impacts avérés et qu’ils sont amenés avec le cycle de l’eau à finir leur course vers le milieu marin.
C’est un projet ambitieux et très intéressant qui nous permettra d’enrichir encore un peu plus nos connaissances et développer notre expertise sur la problématique des déchets aquatiques. Cette étude s’inscrit parfaitement dans la campagne des Initiatives Océanes 2014 qui sera axée sur « l’amont-aval ». Pour cette nouvelle édition nous voulons remonter un peu plus à l’intérieur des terres pour expliquer aux gens qu’un geste pouvant paraitre anodin peut avoir un impact sur le milieu marin.
Interview réalisée par Emilie Chavaroche, Rédactrice Environnement