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Ocean Climax Festival Interview Yannick Jadot, député européen

A l’occasion du Festival Ocean Climax nous avons rencontré Yannick Jadot, député européen qui interviendra vendredi 11 septembre à 14h au cours de la conférence « Une réponse politique est nécessaire et possible » au côté de Kirsten Schulz (Conseiller environnement à l’Ambassade des Etats-Unis en France) et Françoise Gaill (Coordinatrice scientifique Plateforme Océan et Climat).

Qu’est-ce qui vous a séduit dans l’idée de participer à l’Ocean Climax Music Festival ?

La mobilisation de Surfrider – depuis maintenant 25 ans –  pour faire entendre la voix des océans dans l’opinion, mobiliser les citoyens et influencer les politiques publiques et les négociations environnementales est remarquable ! Alors que la conférence de Paris sur le climat se tient dans trois mois, la question des océans, comme celle de l’agriculture et des forêts est largement minorée. C’est un plaisir de participer à ce festival, de contribuer au changement de focale dont la question des océans a besoin, afin d’assurer une réponse globale à l’immense défi climatique auquel nous faisons face aujourd’hui.

Vous êtes député européen depuis 2009, la protection des Océans est-elle à l’agenda du Parlement européen ?

Au sein du Parlement européen, nous avons une commission thématique Pêche, dont je suis membre. Ses compétences sont très étendues : elle négocie et surveille le fonctionnement de la politique commune des pêches, la préservation des stocks de poissons, la lutte contre la pêche illégale ou encore la question des accords internationaux de pêche. D’autres dimensions sont dans l’agenda européen comme la protection du littoral, les aires marines protégées, les espèces protégées, les pollutions chimiques ou pétrolières… et même très récemment l’interdiction des sacs plastiques. La question de la protection des océans est donc largement une question européenne. Depuis 2009, le parlement européen est co-législateur sur la politique commune des pêches, ce qui a permis de changer profondément l’articulation entre pêche et préservation des ressources.

Vous publiez récemment un livre intitulé « Climat, la guerre de l’ombre » et sous-titré « Les citoyens face aux États et aux lobbies », dans lequel vous rappelez la force des initiatives citoyennes pour renverser les tendances quand États et intérêts économiques privés sont inactifs. En matière de lutte contre le changement climatique et de protection de l’océan, que peut faire le citoyen selon vous ?

J’ai voulu faire ce livre pour montrer la force de l’action collective, face à la démission de la plupart des responsables politiques. Aujourd’hui, partout sur nos territoires, dans les villes, dans les campagnes, sur les réseaux sociaux, les quartiers, les entreprises, les municipalités, de milliers d’initiatives pro-climat voient le jour, en dehors des institutions. Que ce soit dans l’agriculture, l’alimentation, l’énergie, les transports, la culture, ils développent des modes de production plus durables, de nouvelles manières de consommer. J’ai voulu ainsi donner la parole à ces hommes et à ces femmes qui, à travers leur lutte contre le dérèglement climatique, dessinent le monde de l’après pétrole, plus solidaire, plus convivial et plus juste. C’est là tout le rôle du citoyen dans la lutte contre le dérèglement climatique, montrer que la société s’organise, qu’elle est prête et même ravie de la transition écologique, et les mettre ainsi face à leurs responsabilités et à leur devoir d’action. A travers ces mobilisations, une chance extraordinaire nous est offerte de nous réconcilier avec la nature. Le monde de la mer reste une grande inconnue pour nombre de nos concitoyens qui ne perçoivent la violence de la dégradation dont il est victime. Pourtant, la multiplication des phénomènes météo extrêmes liés aux océans nous rappellent constamment le lien entre climat et océans. On a encore beaucoup de travail devant nous!

Quelles sont vos attentes et espoirs par rapport à la conférence climat de cette fin d’année ?

La COP21 ne résoudra évidemment pas l’ensemble des enjeux qui nous font face, mais elle doit absolument acter deux choses : un engagement sans faille de l’ensemble des gouvernements dans la réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre afin de pouvoir rester sous le seuil de réchauffement de 2°C, avec des mécanismes clairs de transparence, de contrôle et de révision d’une part, et une véritable politique de financement avec 100 milliards de dollars par an dès 2020, afin d’enclencher le financement des politiques d’adaptation et d’atténuation dans les pays du sud, les moins responsables et les plus vulnérables face aux effets du dérèglement climatique. Idéalement, l’accord de Paris devrait intégrer l’objectif de décarbonation de nos économies et d’engagement vers un futur 100% renouvelables. A Paris, il faudrait que nos dirigeants se libèrent enfin des lobbys des énergies fossiles qui bloquent une société et économie qui sont en train d’émerger. Qu’ils changent enfin leur imaginaire d’un modèle de développement issu du 19ème et du 20ème siècles!

Nous faisons l’observation à Surfrider Foundation Europe et avec nos partenaires que l’océan est le grand oublié des négociations climatiques. Partagez-vous-ce constat ? A quoi est dû cet oubli selon vous ?

Je pense que si les océans sont aujourd’hui absents des agendas politiques, c’est parce que leurs services écosystémiques sont tellement nombreux que l’on suppose la nécessité de les segmenter par thématique (pêche, gestion des littoraux, aires marines protégées, protection de la biodiversité marine, pollutions..). De plus, les océans sont perçus comme des victimes à forte inertie des émissions de gaz à effet de serre. Le GIEC lui-même reconnaît ses difficultés à analyser les impacts des émissions sur l’évolution des océans et de leur fonctionnement. Enfin, plus de la moitié de la surface des océans se situe au-delà des juridictions nationales ou internationales, ce qui ne facilite pas leur prise en compte dans l’agenda législatif.

Retrouvez le programme complet du festival sur le site Ocean Climax et sur facebook!