Le système océanique est intrinsèquement lié à celui du climat. Si l’océan nous permet de vivre sur Terre dans les conditions que nous connaissons, en nous offrant une température homogène sur la planète, de l’oxygène, et en captant une grosse partie du dioxyde de carbone, il subit les effets d’un changement climatique trop rapide. La capacité de l’océan à réguler le climat s’en trouve alors menacée, et par là même l’avenir de la planète et de l’humanité.
C’est pourquoi, en juin 2014, la plateforme « Océan et Climat » s’est créée pour porter ce message : l’océan doit être pris en compte dans les négociations climatiques ! Qu’en a-t-il résulté dans l’Accord de Paris signé le 12 décembre 2015 à l’issue de la 21ème Conférence des parties à la Convention-cadre des Nations-Unies sur les changements climatiques (COP21) ?
Mais d’abord, tour d’horizon du lien entre océan et machine climatique…
Partie 1 : L’océan, réservoir et « redistributeur » de chaleur
Le mécanisme. L’océan stocke la chaleur (en absorbant l’énergie solaire) puis la restitue à l’atmosphère sur de longues périodes (plusieurs siècles), via les courants marins.
Les masses d’eaux chaudes transportent en surface la chaleur accumulée dans les tropiques –> vers les pôles. Par exemple : le Gulf Stream est un courant de surface en Atlantique Nord qui apporte une partie de la chaleur accumulée à l’équateur en transportant les eaux des Caraibes vers l’Europe. Le Canada ne profite pas des eaux chaudes apportées par le Gulf Stream, d’où les différences de températures et de climat entre l’Europe et l’Amérique du Nord.
Puis, ces eaux de surface, en se refroidissant, plongent dans les profondeurs ! A leur tour, ces courants froids circulants en profondeur font le chemin inverse.
Tout cela se faisant en échange permanent avec l’atmosphère, il y a redistribution de la chaleur sur Terre, et donc réduction des écarts de température.
Ces courants forment une boucle de circulation (la circulation thermohaline), comme un « tapis roulant ». Un goutte d’eau effectue une boucle complète en 1000 ans !
L’océan régule notre trop plein d’énergie ! L’excès de chaleur généré par les activités humaines (qui dit « activités humaines » dit augmentation des gaz à effet de serre, et donc augmentation de la température) depuis 1800 est absorbé à 93% par l’océan. Ainsi l’océan atténue l’augmentation de la chaleur dans l’atmosphère; sans lui, la température serait encore plus haute !
Le problème. L’océan se réchauffe, principalement dans les couches superficielles, mais aussi, pour les hautes latitudes, dans les couches profondes.
L’ensemble de la mécanique thermique planétaire est donc affecté par l’augmentation de la chaleur. Exemple concret : le décalage vers le nord du Gulf Stream, auquel s’est superposé la tendance lourde du réchauffement, a pour conséquence le réchauffement des eaux de l’Atlantique.
Et les effets liés se poursuivraient pendant des décennies même si le phénomène s’interrompait aujourd’hui.
Les conséquences du réchauffement de l’océan
- Conséquences sur le niveau de la mer :
- la fonte des glaciers (terrestres) fait augmenter la masse d’eau globale;
- le volume d’eau océanique se dilate du fait de l’élévation de température, ce qui fait également augmenter la masse d’eau.
Résultat : le niveau de la mer augmente ! De 18,7 cm depuis 1901. De 3 mm par an depuis 1992. Et il pourrait monter de 50 cm à 1m d’ici 2100.
- Conséquences sur les espèces :
- Les populations de certaines espèces sont en forte diminution. Exemple concret de la morue : dans le Golfe du Maine, la température de l’eau s’est réchauffée très vite. Qui dit eau plus chaude dit moins de zooplancton. La population de la morue a donc diminué brutalement car elle n’a pas pu s’adapter.
- D’autres populations migrent vers les pôles ou vers de nouvelles zones. Exemple là encore de la morue, dont certaines populations de la mer du Nord se déplacent vers l’Arctique (car dans la mer du Nord, les larves n’ont plus assez de plancton pour grandir). D’ici 2050 cette espèce aura parcouru 290 km !
- Certaines espèces s’adaptent aux changements de température.
- Ces conséquences sur les espèces ont directement des conséquences économiques. Puisque le zooplancton, à la base de la chaîne alimentaire, se déplace vers le Nord (là où la température est la plus favorable), les poissons aussi se déplacent. Ainsi, si on reprend l’exemple de la morue : en mer du Nord, les pêcheurs n’en trouvent plus (donc conséquence directe sur l’activité de ces pêcheurs). Au même moment, en Islande et en Norvège, les pêcheurs en pêchent à profusion puisque la morue migre vers le Nord : cela a pour conséquence de faire baisser le prix de la morue baisse, et donc les quelques morues pêchées en mer du Nord ne rapportent plus rien. Double peine, donc, pour les pêcheurs de la mer du Nord.
- Conséquences sur les évènements exceptionnels. Un océan chaud augmente le réchauffement de l’air. Ce réchauffement de l’air augmente la quantité d’eau qui s’évapore vers l’atmosphère. Le cycle hydrologique atmosphérique change, il est perturbé. Cela se traduit concrètement par une augmentation des précipitations intenses et des sécheresses. Les changements dans la circulation générale de l’atmosphère bousculent aussi les structures de vents, ce qui a pour conséquence une augmentation de l’intensité des cyclones et des inondations. Les régions côtières sont les plus touchées ; la détérioration des milieux naturels des côtes a pour effet de les rendre moins résistantes aux autres conséquences du changement climatique (érosion littorale, perte de biodiversité, migration des populations). Ce cercle vicieux amène inégalités écologiques, économiques et sociales.
La Nouvelle-Orléans, Louisiane, août 2005, après le passage de l’ouragan Katrina – crédits : Vincent Laforet, New York Times/Redux – source : nationalgeographic.fr
Mais l’océan n’absorbe pas uniquement la chaleur … Suite au prochain épisode!
Océanement vôtre,
L’antenne 76 de Surfrider
Sources : Plateforme « Océan et climat », Ressources Surfrider Open Campus, France Inter « Planète environnement », Le Monde « Planète », CNRS