Les pays de l’UE doivent tenir leurs promesses afin de diminuer l’utilisation de plastique
En juin 2019, l’Union européenne a adopté une législation pionnière pour endiguer la pollution plastique: la directive sur les plastiques à usage unique. Il s’agit de la première directive européenne obligeant les Etats membres à interdire une série de plastiques – certains articles en plastique à usage unique et les plastiques oxo-dégradables, pour lesquels des alternatives ont été considérées comme facilement disponibles et abordables. Pour les produits non interdits, la priorité est donnée aux mesures de prévention des déchets, telles que la réduction de la consommation, l’obligation de marquage et les exigences en matière de conception des produits, ainsi qu’à l’amélioration de la gestion des déchets.
Cette directive a été saluée par les citoyens européens, qui souhaitent davantage de mesures pour lutter rapidement contre la pollution plastique et soutenir les produits et emballages durables. Les gouvernements se sont engagés à lutter contre la pollution plastique, mais beaucoup d’entre eux doivent encore faire preuve de pragmatisme et adopter et mettre en œuvre des mesures efficaces pour s’éloigner des plastiques à usage unique.
En juillet 2021, les pays de l’UE devaient avoir interdit plusieurs articles en plastique à usage unique, étiqueté certains objets contenant du plastique restant sur le marché et initié des campagnes annuelles de sensibilisation. Ils devaient également parvenir à une réduction quantitative mesurable de la consommation de gobelets et de récipients alimentaires en plastique à usage unique d’ici 2026 par rapport à 2022 et mettre en place des systèmes de responsabilité élargie des producteurs, à partir de 2023 pour les produits du tabac et de 2024 pour les autres catégories de plastique à usage unique.
Rethink Plastic, composante du mouvement Break Free From Plastic, est une alliance d’ONG européennes, dont Surfrider Foundation Europe, qui œuvre pour un avenir sans pollution plastique. Pour la deuxième fois, un rapport a été publié par Surfrider Europe en collaboration avec Seas at Risk et Zero Waste Europe afin d’évaluer les performances des pays de l’UE dans l’adoption de mesures visant à éliminer progressivement le plastique à usage unique.
Attentes VS Réalité: Ambition des mesures adoptées par les pays de l’UE pour réduire l’utilisation du plastique
Le rapport 2022 révèle que des progrès importants ont été réalisés par la majorité des pays de l’UE, mais que des mesures significatives sont encore attendues de la part des autorités nationales en termes d’ambition politique et d’application de la législation. À la lumière de ces résultats, les ONG européennes appellent les gouvernements nationaux et la Commission européenne à assumer leur responsabilité pour réduire une fois pour toutes la pollution plastique provenant des articles jetables.
Les pays les plus performants en 2021 (Grèce, France, Suède et Irlande) ont été rejoints en 2022 par le Luxembourg, Chypre, la Slovénie, la Lettonie, le Danemark et le Portugal. Certains de ces pays ont même affiché des ambitions plus élevées que celles requises par la directive européenne, notamment en ce qui concerne les mesures visant à réduire la consommation. Parallèlement, il reste quelques retardataires (Finlande et Pologne), et quelques États membres qui ne sont pas suffisamment ambitieux et sont très en retard (Croatie, Slovaquie, Bulgarie, Roumanie et République tchèque) ou négligent certaines mesures clés, comme les Pays-Bas, l’Allemagne, l’Autriche, l’Estonie, la Roumanie, la Hongrie ou la Belgique. Dans ce contexte, certains pays se distinguent par le fait qu’ils ont enfreint la directive dans leur transposition, comme l’Italie, qui a exempté les plastiques biodégradables de certaines de ses mesures.
Des efforts supplémentaires sont nécessaires pour garantir l’application des interdictions adoptées concernant le plastique dans l’UE
Dans tous les États membres, le rapport montre que des efforts supplémentaires sont nécessaires pour assurer le respect des interdictions adoptées, car des articles interdits se retrouvent encore sur le marché en raison de stratégies de greenwashing et d’écoulement des stocks. Concernant la réduction de la consommation, il est difficile de savoir comment certains pays parviendront à atteindre cet objectif ambitieux sans fixer de limites, tandis que les pays qui investissent dans les options de réutilisation présentent le meilleur potentiel de réussite. Étonnamment, le rapport révèle également que la plupart des pays de l’UE n’ont pas défini de stratégies nationales de sensibilisation et ont laissé aux fabricants de plastique et d’emballages la tâche de répondre aux objectifs de sensibilisation. En matière de responsabilité élargie des producteurs, la plupart des pays sont encore loin de se conformer à leurs obligations à temps pour les échéances de 2023 et 2024.
La pandémie de COVID-19 a peut-être entraîné des retards, mais cela ne peut justifier l’inaction continue des gouvernements. La transition vers des produits, des modèles d’entreprise et des systèmes fondés sur la prévention des déchets et la réutilisation peut contribuer à la création d’économies et d’emplois locaux résilients et dynamiques, à la mise en place d’une économie circulaire non toxique et à la protection de la santé, de notre océan et de la planète.
9 recommandations destinées aux pays de l’UE pour l’élimination du plastique à usage unique
Voici quelques recommandations du rapport à l’intention des gouvernements des pays de l’UE pour qu’ils agissent rapidement, dès maintenant, afin d’éliminer progressivement le plastique à usage unique :
1. Assurer la mise en œuvre et l’application complètes des interdictions à l’échelle européenne et étendre les interdictions à d’autres articles en plastique à usage unique ;
2. Prendre des mesures pour s’assurer que les articles interdits sont remplacés par des articles réutilisables ;
3. Fixer des objectifs quantitatifs ambitieux pour d’autres articles en plus des contenants alimentaires et de boissons afin de parvenir à une réduction de la consommation et de promouvoir la réutilisation ;
4. Mettre en place, dès que possible, des systèmes de REP (responsabilité élargie du producteur) qui soient pleinement contraignants, incluent une forte éco-modulation des redevances et couvrent au moins la totalité des coûts de collecte, de traitement, de gestion, de nettoyage et de sensibilisation ;
5. Fixer des objectifs minimaux de contenu recyclé d’au moins 50% pour les bouteilles et d’au moins 30% pour les autres articles ;
6. Augmenter les performances des systèmes existants qui :
– atteignent dès que possible 90% de collecte séparée des bouteilles ;
– incluent les bouteilles en plastique, les canettes de boisson et les bouteilles en verre ;
– peuvent être utilisés à la fois pour les bouteilles à usage unique et les bouteilles rechargeables.
7. Mettre pleinement en œuvre et appliquer les exigences de marquage de la directive ;
8. Mettre en place des mesures de sensibilisation axées sur la réduction de la consommation, les impacts environnementaux et sanitaires des plastiques à usage unique et les alternatives réutilisables disponibles ;
9. Assurer une collecte de données et un suivi approfondis, ainsi qu’une exécution rigoureuse, afin d’évaluer et/ou d’ajuster les mesures pour améliorer leur efficacité.