Le Plan d’Aménagement et de Développement Durable de la Corse (PADD
UC) représente le schéma directeur d’aménagement du territoire corse qui devra se mettre en place dans une approche de développement durable. C’est un instrument stratégique et prospectif qui a valeur de directive territoriale d’aménagement. Une fois approuvé, il doit se substituer au Schéma d’Aménagement de la Corse et au Plan de Développement de l’île et constituera un document-cadre pour les Schémas de Cohérence Territoriale (SCOT) et les Plans Locaux d’Urbanisme (PLU). En effet, ces derniers devront être compatibles et s’articuler suivant les orientations spatiales définies par le PADDUC.
Le PADDUC détermine la planification spatiale des grandes infrastructures et des équipements en Corse. Il définit aussi les axes de développement socio-économiques des zones rurales, urbaines et littorales ainsi que du transport et fixe les politiques de protection de l’environnement et de l’utilisation des ressources énergétiques.
Le PADDUC et l’environnement
Ce nouveau document-cadre d’aménagement porte donc les enjeux les plus importants de la Corse pour les décennies à venir mais soulève déjà des critiques et des interrogations de la part d’associations de protection d » l’environnement à l’image de SFE et U Levante. la question de l’impact de ce projet sur l’environnement se pose et la controverse se situe dans le fait que le PADDUC dessine la cartographie des espaces naturels à protéger et à urbaniser.
Une mauvaise interprétation possible
L’artificialisation du littoral et la dégradation des milieux marins, la perte et la destruction de zones naturelles remarquables et sensibles, la diminution des terres arables et la fragmentation du paysage au travers de projets immobiliers et d’infrastructures sont autant de problématiques à craindre. En effet, l’interprétation du PADDUC par certaines communes a conduit à des projets d’urbanisation sur un littoral déjà fragilisé en Corse du Sud (comme à Grosseto-Prugnia-Porticcio, Prunelli di Fiul’Orbu) et en Haute-Corse (Borgo, Lumio, Olmeta di Tuba, Poggio Mezana et Sisco) notamment.
Des difficultés concernant son élaboration
Depuis le vote de la Loi du 22 Janvier 20102 relative à la Corse (loi n°2002-92) connue aussi sous le nom de discussions dites de Matignon, le Conseil Exécutif de la Corse (Organe exécutif de la Collectivité Territoriale de Corse) a compétence pour élaborer le PADDUC. Pour le moment, le Conseil Exécutif n’a pas réussi à trouver de majorité au sein de l’Assemblée de Corse pour approuver le projet de PADDUC sur lequel il travaillait depuis 2003. A ce titre, il a dû le retirer de l’examen en séance le 15 juin 2009 montrant ainsi les divergences politiques dont ce projet fait preuve. En février 2010, le Président de l’époque, Nicolas Sarkozy, lors de sa visite sur l’île a exprimé sa volonté de relancer le projet. En avril 2011, plus de 80 représentants élus, membres d’associations et experts de l’aménagement ont travaillé sur une redéfinition du PADDUC. L’ancien ministre de l’intérieur, Claude Guéant, présentait le PADDUC au Conseil des MInistres en 2011 et le dossier arriva le même jour au Sénat qui adopta le projet de loi le 18 Octobre 2011. Le 29 juin 2011, le Gouvernement a adopté, un autre projet de loi qui vise à « intégrer les apports de la loi « Grenelle II » au PADDUC, de consolider la valeur juridique de ce dernier, et d’en améliorer la procédure d’élaboration afin de rendre plus facile la recherche d’un consensus ». Ces apports comprennent l’intégration de la gestion du risque d’inondation, la mise en oeuvre de la « trame verte et bleue » dans les schémas d’aménagement.
Les enjeux actuels du PADDUC
Malgré un nombre important de petites communes en Corse ne nécessitant pas la mise en oeuvre systématique de plans d’aménagement, un rapport du Sénat du 12 Octobre 2012 souligne l’urgence à combler rapidement le vide juridique en matière d’urbanisme et d’aménagement. A l’heure actuelle, aucun Schéma de Cohérence Territorial n’a lieu sur l’île et seulement 35% des communes possèdent un PLU. Cependant, si le projet du PADDUC ne se décline pas sous la forme d’un développement réellement durable et raisonné respectant l’environnement de la Corse et s’il n’y a pas des vraies implications de la part des citoyens et de la société civile dans sa rédaction, alors il ne pourra pas être considéré comme un réel document-cadre à suivre. Certaines communes élaborant actuellement leurs dossiers d’urbanismes dans le cadre du PADDUC ont vu leur projet annulé par les services de l’État car présentant des incohérences face aux lois Littorales et au code de l’urbanisme (urbanisation d’espaces naturels littorales considérés comme remarquables). C’est le cas de la communauté de Communes du Cap Corse (14 communes), de la commune d’Aléria et de Calcatoggio. Il faut aussi noter que plusieurs tentatives de conversion de zones non-constructibles en terrain constructibles détenus par des élus pu des maires ont été rapportées comme le montre les résultats du Tribunal Administratif de Bastia et de Marseille. Théoriquement, le projet PADDUC sera finalisé fin 2013. Le conseil Exécutif table maintenant sur une phase de concertation avec les différentes agences de l’état et un questionnaire ciblant le grand public est en mise en ligne depuis le 27 Juin 2012.
Le PADDUC et SFE
Le PADDUC représente un enjeu politique, socio-économique, juridique et environnemental et dès lors des contradictions émergent. Cependant, la position de SFE est claire, la création d’un tel document doit se faire suivant les principes du développement durable et des lois relatives à la protection de l’environnement (Lois littorales, Grenelle, etc…) et non au détriment du patrimoine naturel de la Corse. Dans ce cadre, la mobilisation de l’association a par exemple conduit à l’annulation d’une partie du PLU de Bonifacio (Corse du Sud) qui prévoyait la construction d’infrastructures dans des zones littorales. La protection des milieux littoraux et marins et plus largement des espaces naturels sensibles, éléments fondamentales de l’identitité culturelle et de l’économie corse et support d’une biodiversité importante, doit donc être un segment cardinal dans le tracé des orientations d’aménagement du PADDUC.
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Quentin Dilasser, Assistant de projet Méditerranée