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Landunvez : de nouvelles analyses préoccupantes sur la pollution de la plage de Penfoul

Les analyses réalisées cet été révèlent la présence de traceurs ADN bovins, porcins et humains et montrent le rôle important de l’élevage dans la pollution du Foul, le ruisseau qui traverse la plage de Penfoul, à Landunvez. Un spot de baignade et de surf réputé.

Des concentrations importantes de bactéries fécales par temps de pluie. Les dernières analyses réalisées cet été grâce à nos bénévoles confirment que la qualité de l’eau reste encore trop souvent mauvaise sur la plage de Penfoul, à Landundez.

En 2023, nous avions déjà révélé d’importants dépassements des normes sur ce spot de baignade et de surf réputé, suite aux alertes répétées de nos ami·es d’Eau et Rivières de Bretagne et de l’Association pour la protection et la promotion de la côte des Légendes, l’APPCL. Cette année, nous avons cherché à mieux comprendre l’origine de la pollution.

Une recherche de traceurs ADN

Rien n’aurait été possible sans notre réseau citoyen de surveillance de la qualité de l’eau : les Costal Defenders. Entre avril et juillet 2024, plusieurs bénévoles ont réalisé des prélèvements en amont et à la sortie du ruisseau du Foul, qui se jette dans la mer à marée haute. Ces prélèvements ont ensuite fait l’objet d’analyses en laboratoire. L’objectif était de réussir à déceler des séquences d’ADN dans les bactéries pour en savoir plus sur l’origine de la pollution, comme dans les séries policières.

Pour cela, nous nous sommes appuyés sur la méthode Bactrac, qui permet d’enquêter sur les pollutions fécales (entérocoques et Escherichia Coli), à une échelle allant du bassin versant au littoral. Si le sujet vous intéresse, on vous recommande chaudement cet article sur le site du laboraratoire Santé, Environnement et microbiologie de l’Ifremer, qui explique comment les scientifiques procèdent.

Un pic de pollution lorsqu’il pleut

Les résultats de nos analyses sont très clairs : “Lorsqu’il pleut, les marqueurs bovins et porcins sont présents, en plus du marqueur humain. Pour Surfrider, les mauvaises pratiques liées à l’épandage et le ruissellement sur les champs agricoles contribuent très largement à la pollution du cours d’eau et du milieu marin”, explique Marc Valmassoni, responsable de campagne chez Surfrider.

Contrairement à ce qu’affirment les autorités depuis des années, le modèle agricole est donc bien en cause ici : suite à des pluies modérées, on constate un pic de pollution associé à l’apparition claire des marqueurs ADN porcin et bovin.

Malgré ces résultats préoccupants, nous nous réjouissons que les autorités prévoient la création d’une Zone à enjeux sanitaires (ZAES), comme l’a rapporté le Télégramme en juillet. Cette initiative annoncée par la préfecture et les élus locaux permettra de mieux identifier les différentes sources de pollution de la plage de Penfoul, à l’instar des activités agricoles.

Mais une fois le diagnostic posé, les autorités feront-elles le nécessaire pour stopper cette pollution ? Là encore, nous resterons vigilant·es pour les encourager à prendre des mesures concrètes : identifier des parcelles agricoles “à risque”, interdire les épandages dans certaines zones si nécessaire… “En l’état, il nous semble impossible d’envisager de nouvelles pressions agricoles sur un bassin versant aussi pollué”, ajoute Morgan, un bénévole qui a participé à la réalisation de nos prélèvements.

Des défaillances dans le système de surveillance

Ces résultats révèlent aussi les défaillances dans le système de surveillance et de gestion des eaux de baignade : celui-ci peine à identifier la pollution sur certains secteurs, et ne contraint pas suffisamment les autorités à enquêter sur son origine.

Sur une plage comme celle de Penfoul, où la pollution est récurrente, avec des activités agricoles dans les environs, une surveillance plus fine devrait être automatiquement mise en place pour analyser les flux bactériens potentiels et déterminer quel animal (porc, bovins, humains…), est en mesure de de produire la quantité de bactéries qu’on retrouve sur la plage. Par ailleurs, les mesures pour éliminer la pollution devraient s’accompagner d’une meilleure communication auprès du grand public.

Les associations et lanceurs d’alerte ont un rôle clef à jouer dans la détection des défaillances du système de surveillance actuel. Il nous parait donc essentiel que ces acteurs soient associées aux réflexions et décisions des autorités pour l’amélioration de la qualité de l’eau.

Renforcer la législation européenne

Landunvez est loin d’être un cas isolé. Dans un rapport de 2023, l’Agence européenne pour l’environnement estime que la qualité de l’eau est “excellente” dans 85,4 % des sites de baignade surveillés.

Mais cette statistique a priori rassurante est trompeuse : elle ne prend en compte que les bactéries et pas les déchets, les algues ou les polluants chimiques. Surtout, la réhabilitation des cours d’eau, des fleuves et des plages contaminées n’avance que très lentement : le pourcentage de sites dont la qualité est jugée “insuffisante” stagne depuis plus de 10 ans.

C’est pourquoi nous plaidons pour renforcer la législation. La directive européenne eaux de Baignade doit être révisée en 2025. Notre Manifeste pour des eaux saines remis en 2020 à la Commission européenne récapitule nos demandes pour renforcer la prévention (par exemple, en surveillant la qualité de l’eau toute l’année, pas seulement l’été), mieux informer le public, obliger les Etats à stopper la pollution à la source et réhabiliter les zones polluées.

”Nous souhaitons porter la voix des sites contaminés de façon chronique comme Landunvez, et exigeons des travaux de reconquête de la qualité des eaux pour garantir une qualité excellente à l’ensemble des usagers de la mer”, fait valoir Théo Tostivint, responsable de projets chez Surfrider.

Les mesures que nous défendons sont indispensables pour préserver l’environnement et notre santé à tous·tes.