Alors même que l’association locale Good Karma Projects les combat, depuis 2018, et que Surfrider Europe a récemment alerté les institutions européennes, aucun changement n’a pu être observé quant aux déversements massifs de pellets aux abords du polygone industriel de Tarragone… Une telle pollution ne doit plus être ignorée : Good Karma Projects et Surfrider Europe lancent alors, ce 19 juin, l’expédition #ChasingPellets. Cherchant à les collecter, par bateau, entre Tarragone et les Baléares, cette nouvelle campagne sera un bon moyen d’alerter citoyens, décideurs publics et industriels à propos de ces déchets aussi appelés “larmes de sirènes”.
Pellets à Tarragone : un cas Coastal Defenders depuis 2020
En 2018, un groupe de surfeurs espagnols signalait, pour la première fois, la présence massive de larmes de sirènes sur la plage de La Pineda, à Vila-Seca, près de Tarragone. Petites sphères de plastique utilisées comme matière première dans la fabrication de la plupart des articles en plastique, ces granulés peuvent “se perdre” à chaque étape de leur chaîne de production et de distribution et il est certain qu’ils sont manipulés au sein du plus grand complexe sont déversés particulièrement massivement autour du plus gros complexe industriel de Tarragone. Ne se dégradant jamais, ils causent alors des dommages irréversibles à la biodiversité marine : s’ils intègrent progressivement la chaîne alimentaire – jusqu’aux poissons que nous mangeons -, ils peuvent également être vecteurs de déploiement des bactéries dans les milieux aquatiques.
En raison des vagues et des vents, on peut trouver des boulettes tous les jours sur la plage. Des quantités plus importantes peuvent également être observées lors de phénomènes météorologiques tels que la tempête Filomena de janvier 2021. Good Karma a observé et surveillé leur présence sur la plage à plusieurs reprises. En 2018, Greenpeace indiquait qu‘environ 120 millions de pellets avaient été trouvées sur la plage.
Dans le cadre de sa lutte contre la pollution microplastique et de ses activités de plaidoyer auprès de l’Union européenne, Surfrider Foundation Europe et son bureau espagnol ont rejoint Good Karma Projects à l’automne 2020 par le biais de son programme Surfrider Coastal Defenders, pour soutenir ce combat local et continuer à exiger une réponse légale à cette pollution de la part des États membres et de l’Union européenne, conscients des impacts dévastateurs de cette pollution au niveau européen et mondial.
Ocean Clean Sweep : la fausse bonne action des industriels du plastique ?
Malgré les revendications des associations environnementales – Surfrider Europe a notamment publié un rapport détaillé en novembre dernier – et bien qu’ils soient la cause de ces fuites constantes, les industriels continuent de s’opposer à l’adoption d’une nouvelle législation relative aux granulés plastiques. Comment ? En faisant valoir leur adhésion à l’Opération Clean Sweep (OCS) : conçu pour éviter la perte de pellets et leur dissémination dans l’environnement aquatique tout au long du processus de production, ce programme international a été créé par les industriels de la filière eux-mêmes.
Si, en cotisant à l’OCS, ces derniers s’engagent à respecter certains critères et à se faire aider dans la mise en œuvre de bonnes pratiques de manipulation des pellets et d’entretien des sites industriels, les mesures mises en place s’avèrent peu contraignantes et n’ont pas fait preuve d’efficacité. Des larmes de sirènes sont toujours présentes, par milliers, aux abords du polygone industriel de Tarragone, continuant d’envahir l’Océan.
Découvertes récentes sur ce cas de pollution
En décembre 2020, après avoir effectué les premières évaluations en se concentrant uniquement sur la plage de la Pineda, Good Karma Projects, avec le soutien de Surfrider Europe, a décidé de poursuivre son enquête à l’intérieur des terres, en suivant la rivière Francoli, qui traverse la zone pétrochimique. En coordination avec Surfrider Europe, Good Karma Projects a récemment présenté les progrès de son étude lors du Congrès national espagnol de l’environnement – CONAMA – qui s’est tenu à Madrid fin mai 2021. « Les sources d’émission de granulés plastiques sont claires, nous les avons retrouvées dans tous les ruisseaux et rivières situés à proximité des entreprises qui les produisent ou les manipulent. Il existe des concentrations importantes de granulés dans les cours d’eau jusqu’à 20 km à l’intérieur des terres », déclare Jordi Oliva de Good Karma Projects.
#Chasingpellets : une nouvelle expédition contre ces microplastiques
À plusieurs kilomètres de Tarragone, dans les îles Baléares, d’autres ONG comme « Save the med » ou « Per la Mar Viva » ont signalé qu’elles trouvaient également des quantités importantes de granulés sur leurs côtes. Compte tenu de la direction du mistral qui souffle dans cette zone et de l’orientation des côtes des Baléares par rapport à Tarragone, une question est venue à l’esprit des équipes du Good Karma Project et de Surfrider : les granulés trouvés sur les plages des Baléares seraient-ils identiques à ceux trouvés dans la rivière Francoli et sur les plages de La Pineda ?
Pour le comprendre, Good Karma Projects et Surfrider Foundation Europe lancent, ce 19 juin 2021, l’expédition #ChasingPellets. Pendant dix jours, Jordi Oliva, Albert Font de Rubinat – tous deux fondateurs de Good Karma Projects – et Simon Witt, responsable du programme Coastal Defenders de Surfrider Europe, auront pour objectif de collecter les pellets présents en Méditerranée à l’aide d’un chalut Manta, entre Tarragone et les Baléares. Accompagnée de Marta Sugrañes, biologiste et océanographe travaillant sur le suivi au sein de Good Karma Projects, l’équipe ramènera de son voyage en mer des échantillons qui seront analysés avec l’aide technique et scientifique de l’Université de Barcelone.
Accompagnés d’Ainoha Munõz, photographe partageant quotidiennement les clichés de l’expédition, les activistes chercheront à rendre compte de l’ampleur des dégâts, démontrant que les pellets rejetés par le polygone industriel tarragonais peuvent être diffusés, en mer, à des centaines de kilomètres de leur origine.
Au-delà d’informer les citoyens espagnols et européens au sujet de cette pollution, cette expédition vise surtout à alerter les décideurs publics quant à l’inefficacité d’initiatives volontaires telles que l’Opération Clean Sweep et les inciter à adopter de nouvelles lois obligeant l’ensemble de la chaîne des granulés plastiques à cesser de les déverser et à contrôler leurs actions. Pour qu’elle soit un véritable succès, n’hésitez pas, dès lors, à partager, tout au long de l’expédition, nos photos et vidéos sous le hashtag #ChasingPellets !