Chaque année, plus de 200 000 tonnes de plastique sont jetées en Méditerranée*, la mer la plus polluée au monde. Menace majeure pour l’Océan, le plastique dégrade les écosystèmes marins, en plus de participer au changement climatique. Partant de ce constat, Surfrider Foundation Europe, la Fondation Tara Océan, la Fondation Mava et la Fondation Prince Albert II de Monaco se sont rassemblés pour créer l’initiative Beyond Plastic Med (BeMed) en 2015. Forte d’un large réseau de projets et associations, BeMed a pour vocation de lutter contre la pollution plastique en Méditerranée. Partenaire historique, Surfrider Foundation Europe soutient BeMed par le biais de ses actions de mobilisation, et de son expertise scientifique et juridique. Découvrez notre interview de Lucile Courtial, Secrétaire exécutive de BeMed, pour en apprendre plus sur cette initiative unique.
Portée par un rassemblement d’acteurs-clés dans la protection du milieu marin, dont Surfrider Foundation Europe, BeMed est née de la volonté d’agir face à l’ampleur de la pollution plastique en Méditerranée. Pourrais-tu nous présenter les partenaires de BeMed ?
BeMed a bénéficié de soutiens variés depuis son lancement en 2015. La Fondation Prince Albert II de Monaco, Surfrider Foundation Europe, la Fondation Tara Océan, Fondation Mava et l’UICN, membres fondateurs de BeMed, ont chacun contribué, par exemple via leur expertise scientifique, l‘élargissement du réseau, ou encore le développement des projets. En étant impliquée dans 14 pays du bassin méditerranéen, BeMed bénéficie également d’un large réseau d’acteurs locaux issus de la société civile. Enfin, on travaille avec le secteur privé via notre Collège d’Entreprises. BeMed s’inscrit dans une démarche collaborative, en mettant à contribution différents acteurs, de manière complémentaire. Autrement dit : mettre en commun, pour être plus fort face à la pollution plastique en Méditerranée.
Tu mentionnais le collège d’entreprises de Bemed, regroupant des acteurs du secteur privé qui sont prêts à s’engager pour la réduction du plastique en Méditerranée. Quelle est la vision de Bemed concernant le rôle que peuvent jouer les entreprises dans la protection de l’Océan ?
Certes, les entreprises ne sont pas parfaites en tant qu’émettrices de CO2 et de déchets, néanmoins elles sont de plus en plus à vouloir faire de réels efforts. Pour réduire le problème à sa source de manière globale, rien de tel que de travailler avec le secteur privé. Les grandes entreprises, notamment les multinationales, peuvent au choix avoir un impact direct positif ou négatif sur le nombre de tonnes de plastiques mises sur le marché. Les entreprises engagées aux côtés de BeMed peuvent ainsi s’impliquer dans des projets pilotes pour tester des solutions sur le terrain, , ou encore travailler sur la fin de vie des déchets. La prochaine étape ? Explorer de nouveaux projets avec des partenaires issu de l’industrie agro-alimentaire…tout en restant très vigilant face aux tentatives de “greenwashing”.
Bemed est présent dans les îles du bassin méditerranéen, particulièrement vulnérables à la pollution plastique. Comment parvenez-vous à mobiliser les autorités locales et les habitants de ces régions ?
Tout dépend du pays et du contexte. Certains endroits bénéficient déjà d’une sensibilisation à la pollution plastique locale de la part de la municipalité. Alors que d’autres communautés sont peu sensibilisées à ces questions. La Méditerranée connaît des contextes socio-économiques très différents, donc il faut apprendre à s’adapter. Une solution qui marche à un endroit peut ne pas fonctionner ailleurs.
Développer des solutions low-tech contre le plastique en Corse, encourager le recyclage communautaire au Liban, faire une collecte de déchets à Malte en plongée…La liste des projets que soutient Bemed est longue. Quel projet vous a particulièrement marqué, s’il fallait n’en choisir qu’un ?
J’ai particulièrement apprécié le récent projet de la Small Islands Organization (SMILO) dans l’archipel des Iles d’Or. Ce projet visait à produire une alternative durable au plastique à usage unique à partir de canne à sucre. L’idée était de travailler avec des producteurs locaux, et de tester plusieurs autres matériaux durables, pour répliquer la solution dans d’autres îles. Cela a permis de créer une dynamique vertueuse, en engageant directement les acteurs locaux dans la protection de leur territoire. Et les îles de Méditerranée constituent de bons laboratoires de solutions contre le plastique, pour ensuite les imaginer à l’échelle d’un pays tout entier.
Pourrais-tu nous parler de tes missions en tant que secrétaire exécutive de Bemed ? Qu’est-ce qui te motive le plus dans ton travail au quotidien ?
Je suis initialement biologiste marin. Après avoir fait une thèse sur la conservation des récifs coralliens, je voulais me connecter à plus de réalité de terrain. Avec BeMed, je ressens davantage l’impact concret de mon action. C’est particulièrement gratifiant de voir l’aboutissement de nos idées en projets avec des résultats concrets au fil du temps. Aussi, on effectue régulièrement des déplacements, comme récemment en Albanie avec Surfrider Foundation Europe. Cela nous permet d’apprendre à connaitre les porteurs de projet et de comprendre leurs besoins pour les accompagner au mieux. D’autre part, on organise des évènements, conférences et ateliers pour notre réseau. De manière générale, mes missions vont de la communication, à la finance, l’administration, jusqu’au développement de projets… Je n’ai donc pas vraiment de quotidien type !
Depuis 2015, comment a évolué le travail de Bemed face au défi du plastique dans le bassin méditerranéen ? As-tu déjà pu constater des améliorations ?
Oui, j’ai constaté une évolution dans la prise de conscience générale du problème. Au niveau international, plus d’acteurs ont la volonté de mettre en commun leurs efforts pour avancer. Le changement s’effectue aussi au niveau des entreprises, qui réfléchissent désormais à des stratégies plus efficaces, axées sur la réduction à la source du plastique plutôt que sur le recyclage. Concernant la Méditerranée, c’est encourageant de constater que l’on est en train de construire une approche régionale face à la pollution plastique, par exemple via la Convention de Barcelone. Concilier des contextes aussi variés que ceux de la Méditerranée prouve qu’il est aussi possible de fédérer les pays à l’échelle du monde. La pollution plastique ne connaît pas de frontières, alors faisons en sorte que notre action soit coordonnée à l’échelle globale.
Merci à Lucile Courtial d’avoir répondu à toutes nos questions. Pour plus d’informations sur l’initiative BeMed, consultez sa page internet.
*Source : Ifremer