Le littoral basque a accueilli une nouvelle espèce d’algue nocive pour la deuxième année consécutive. Pour les surfeurs et baigneurs locaux, son nom est désormais familier : il s’agit de l’algue Ostreopsis. Retour des experts de Surfrider Foundation Europe sur les études et analyses en cours.
État grippal, difficultés respiratoires, irritations cutanées, goût métallique…
Ces symptômes « post-baignade » vous sont familiers ?
Venez témoigner !
Une apparition inattendue sur la côte basque cet été
Depuis la fin du mois de juillet, de nombreux usagers de la mer du littoral basque ont signalé des cas de gênes respiratoires, de brûlures pulmonaires, ou encore, d’irritation cutanée, après leur session de surf, leur baignade et même simplement en restant sur leur serviette sur le sable. Missionné par les mairies de la région, l’Institut Français de Recherche pour l’Exploitation de la Mer (IFREMER)a ainsi conduit des campagnes d’analyses et de prélèvements sur plusieurs sites de baignade entre Hendaye et Biarritz, afin d’enquêter sur le phénomène. Selon les premiers résultats, il semblerait que l’algue Ostreopsis, potentiellement toxique, soit présente sur le littoral basque, après être apparue une première fois à Hendaye à la fin du mois d’août 2020.
On répertorie plusieurs espèces d’Ostreopsis à travers le monde, qui se distinguent selon leur niveau de toxicité pour la biodiversité marine et pour l’humain. Si cette algue n’est généralement pas présente dans les eaux européennes, les effets du changement climatique et de l’essor du transport maritime pourraient cependant expliquer son développement inattendu depuis la fin de l’été 2020 sur la côte basque.
Pour en apprendre davantage sur l’Ostreopsis, lisez notre dernier article et notre livret pédagogique
Un mois après l’apparition de l’Ostreopsis, où en sommes-nous ?
Des études et prélèvements ont été effectués tout au long de l’été sur les sites d’observation d’Hendaye à Biarritz. Lorsque les résultats d’analyse définitifs seront disponibles, ils permettront de mieux identifier l’espèce d’Ostreopsis dont il est question, pour ensuite mieux comprendre son fonctionnement, et surtout, son gradient de toxicité. Au 20 août dernier, l’Agence Régionale de Santé de Nouvelle-Aquitaine a recensé 395 cas avérés de personnes impactées par l’Ostreopsis, et continue de collecter des témoignages. Via son communiqué de presse, elle nous informe que des campagnes d’analyse dans la colonne d’eau et sur le stock algal devraient se poursuivre jusqu’à la fin septembre et invite les personnes ayant eu des symptômes à témoigner en remplissant la fiche de signalement.
Surfrider Foundation Europe lance un travail innovant de science participative
Aux côtés des autorités, les relais locaux de Surfrider Foundation Europe participent au travail d’identification de cette nouvelle espèce d’algue Ostreopsis. Tout d’abord, depuis le début de la saison estivale, le bureau Méditerranéen et l’antenne Hérault travaillent sur un projet inédit de « quantification » de l’Ostreopsis dans le milieu marin, en partenariat avec le laboratoire Microbia Environnement. Des prélèvements d’eau et d’algues ont ainsi été réalisés tout au long de l’été de façon régulière sur la commune de Gruissan, et seront analysés prochainement.
D’autre part, l’antenne côte basque de Surfrider Foundation Europe est impliquée dans un projet de science participative relié à l’apparition récente de l’Ostreopsis, en partenariat avec le laboratoire d’analyse Microbia Développement. A l’aide de matériel scientifique de préanalyse, les membres de l’antenne côte basque n’ont pas hésité à se jeter à l’eau pour réaliser plusieurs prélèvements sur 5 spots entre Saint-Jean-de-Luz et Biarritz. Les échantillons seront envoyés prochainement en laboratoire pour analyse et interprétation. Ils pourront également servir à mettre au point un outil innovant de veille sanitaire : un biocapteur destiné à détecter la présence d’Ostreopsis. Le développement de ces biocapteurs permettrait de connaitre l’état des eaux côtières en temps réel et d’être réactif en cas de risque, limitant ainsi le nombre de personnes exposées à l’Ostreopsis.
Quelles leçons peut-on tirer de l’arrivée de l’Ostreopsis sur la côte atlantique?
Aux côtés des autorités publiques et scientifiques (e.g. communes, ARS, agglomération, IFREMER, Rivages Pro Tech), Surfrider Foundation Europe est engagé dans un travail de fond visant à mieux comprendre l’arrivée de l’algue Ostreopsis sur la côte basque, afin de prévenir les risques sanitaires pour les usagers de la mer et les risques socio-économiques liés à la fermeture des zones de baignade. « Nous n’avons pas encore de recul sur l’apparition de cette espèce, ni sur son mode de développement et ses possibles impacts », explique Marc Valmassoni, l’un des responsables du pôle expertise de Surfrider Foundation Europe. Engager une concertation avec toutes les parties prenantes compétentes permettra alors d’appréhender de manière holistique cette nouvelle menace de nos littoraux.
Depuis de nombreuses années, Surfrider Foundation Europe revendique l’intégration de nouveaux paramètres dans le contexte de la révision de la directive européenne sur la surveillance et la gestion des eaux de baignade. En effet, il est crucial que les paramètres « algaux » soient pleinement intégrés à la directive et qu’ils apparaissent comme un paramètre prépondérant dans la surveillance des plages, comme préconisé par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS).
Impliqué depuis plus de trente ans dans les problématiques relatives à la qualité des eaux, Surfrider Foundation Europe constitue à la fois un acteur de terrain au plus proche des zones polluées, un acteur d’innovation et d’expertise dans le développement de solutions adéquates, et enfin, un acteur de médiation auprès des pouvoirs publics, de la communauté du surf, des acteurs du tourisme et de la société civile.
Crédit photos : camdam photography