Au nord de l’Espagne, dans la province de Bizkaia, se niche une réserve naturelle d’exception : la réserve d’Urdaibai.
Créée en 1984 par l’UNESCO et inscrite au réseau Natura 2000 ainsi qu’à la convention de Ramsar, cette zone est la seule réserve de biosphère de la communauté autonome du Pays basque. Son cœur écologique est constitué par l’estuaire de la rivière Oka, un ensemble unique d’écosystèmes côtiers : falaises maritimes, marais salants, herbiers marins, forêts de chênes, zones humides.
Ce site, d’une richesse écologique inestimable, est aujourd’hui menacé par un projet d’urbanisation d’envergure : l’extension du musée Guggenheim.
Une zone essentielle pour le climat, la biodiversité et les populations locales
Les prés salés et herbiers de zostères de l’estuaire d’Urdaibai représentent des écosystèmes de carbone bleu à haute valeur écologique. Ils stockent le carbone, atténuent les effets de l’érosion, protègent contre les inondations, filtrent l’eau, et offrent un habitat crucial à de nombreuses espèces, notamment des échassiers migrateurs. Parmi les plus emblématiques : la spatule blanche (*Platalea leucorodia*), le butor étoilé (*Botaurus stellaris*), le balbuzard pêcheur (*Pandion haliaetus*) ou encore le vison d’Europe (*Mustela lutreola*), un petit mammifère carnivore en danger critique d’extinction.
L’estuaire abrite également la plus grande superficie d’herbiers marins du Pays basque : 19,8 hectares de *Nanazostera* (zostère naine) ont été recensés en 2012. Quant aux prés salés, ils accueillent une grande diversité de végétation typique des zones humides, dont des joncs maritimes, de la spartine maritime ou encore de la salicorne rougissante.
Mais au-delà de ces dimensions scientifiques, Urdaibai est un espace de reconnexion à la nature pour les communautés locales. Surf, observation des oiseaux, balades dans les marais sont autant d’activités qui participent au bien-être des habitants et à la valorisation d’un patrimoine naturel commun.
Un projet culturel aux lourdes conséquences
Depuis 2008, le projet d’une extension du musée Guggenheim de Bilbao dans la réserve refait régulièrement surface. Il prévoit la construction de deux bâtiments distants de cinq kilomètres, reliés par une passerelle sur pilotis traversant la zone protégée.
– Le premier site, à Gernika, se situerait sur l’emplacement d’une ancienne usine industrielle.
– Le second s’implanterait sur les terrains de l’entreprise navale Astilleros de Murueta, en pleine zone humide, là où des dragages passés ont déjà causé d’importantes perturbations écologiques.
Si ce “grand projet” n’a pas encore été officialisé, des mesures ont déjà été prises pour qu’il puisse voir le jour, telle qu’une réduction exceptionnelle de la servitude de protection littorale – de 100 m à seulement 20 m – a été adoptée. Cette décision est aujourd’hui contestée en justice par plusieurs ONG, dont Greenpeace.
La fréquentation prévue de 144 000 visiteurs par an, concentrée entre juin et septembre, risque également d’aggraver la pression touristique déjà forte dans cette zone. Cette surfréquentation menace l’équilibre écologique d’Urdaibai et ses ressources naturelles, comme l’approvisionnement en eau.
Une mobilisation croissante de la société civile
Face à cette menace, la mobilisation locale s’intensifie. Depuis la création de la plateforme Guggenheim Urdaibai Stop en février 2023, plusieurs manifestations ont rassemblé des milliers de personnes, notamment à Gernika en octobre 2023 et octobre 2024.
De grandes organisations environnementales espagnoles comme SEO/BirdLife, Greenpeace, WWF, Ecologistas en Acción ou Amigos de la Tierra ont pris position pour l’abandon pur et simple du projet.
Pourquoi Surfrider s’oppose au projet
Résolument engagée pour la préservation et la restauration des écosystèmes marins et côtiers à travers l’Europe, Surfrider Foundation se joint aux associations ayant déjà pris position et s’oppose fermement à ce projet qui menace directement des écosystèmes de carbone bleu. Il met en péril un patrimoine naturel, culturel et social essentiel à la lutte contre le changement climatique, à la préservation de la biodiversité et au lien quotidien entre les populations et la nature.
Nous considérons que les investissements publics annoncés devraient être redirigés vers la restauration écologique de la réserve, et non vers sa transformation.
Urdaibai n’est pas à vendre. Préservons-la.
Une pétition lancée par Birdlife a déjà réuni plus de 30 000 signatures. Vous pouvez la signer ici pour soutenir cette lutte :
👉 Signer la pétition