Les acronymes ne devraient être fournis que sur avis médical.
Tels les antibiotiques, il ne faut pas dépasser la dose prescrite si l’on ne veut pas transformer l’effet salvateur en effet pervers. Dans les deux cas, on doit faire face à des pollutions induites liées à une utilisation généralisée et trop fréquente : celles des nappes d’eau pour les médicaments et celles des intellects pour les accumulations de sigles.
Pourtant, toutes générations confondues, réunis dans une nécessité de relever les défis du DD , nous abusons de ces satanés acronymes obscurs.
Au sein de SFE, nos programmes évoquent des enjeux terrifiants : QES, ACC, ADT, TM…
Heureusement nos campagnes sont sérieuses et organisées : CARE est bien armée avec GDC, EEDD, IO, …
Tant qu’on est dans la sémantique, il y a un côté vertigineux à penser que ces sigles sont issus d’une association : une structure qui veut associer des individus dans un but commun mais en employant des noms barbares que « l’autre » ne pourra comprendre que plus tard.
Le fameux « autre ». Celui dont on se passerait bien mais sans lequel nous ne savons pas vivre. Notre pire ennemi, notre meilleur ami. Ou l’inverse.
Dans les discours relatifs à la protection de l’environnement, l’autre dont c’est toujours la faute s’il y a de la pollution, ou si les solutions ne sont pas apportées…
Rentrer dans une démarche de RSO pour une ONG comme la notre, c’est justement et avant toute chose l’affirmation d’un positionnement vis-à-vis de l’autre: celui à qui l’on parle, celui qui nous regarde, celui qu’on veut emmener avec nous.
S’il veut nous soutenir, nous voulons lui dire avec franchise que si nos visions sont idéales, notre volonté inaltérable de les mettre en oeuvre, et nos actions marquées par la recherche d’efficacité, nous ne ferons jamais mieux que notre maximum, et parfois nous commettrons des erreurs.
S’il veut nous rejoindre, il doit comprendre que nous voulons imposer des solutions à la société parce que nous en faisons partie, et nous ne devons pas perdre de vue que nous faisons aussi partie du problème.
S’il nous observe avec méfiance, lui dire clairement que non seulement nous souhaitons changer la société parce qu’il n’y pas d’autre alternative, mais nous nous efforçons de ne pas croire que la force de notre constat et de nos volontés de changement nous exempte de la nécessité d’une analyse critique de nos propres actions.
S’il nous observe avec défiance, nous lui affirmons que notre attente à minima est qu’il adopte la même attitude critique vis-à-vis de lui même.
La RSO d’une ONG c’est faire sa BA ou c’est OK ?
Pour « les autres » je ne sais pas.
Pour SFE, cette démarche commence par une posture d’humilité ambitieuse en admettant que notre ONG est un système humain organisé, donc imparfait, visant à rapprocher d’un idéal nos sociétés humaines, donc imparfaites.
Puisque nous avons choisi de porter l’exécution de notre mission sociale, nous n’avons d’autre choix que d’assumer cette responsabilité : ne rien faire c’est laisser faire, mais mal faire est un risque permanent à accepter. Et à surveiller.
Ce n’est pas chose aisée, car tous les jours, nous devons faire des choix essentiels non seulement sur nos priorités d’actions mais aussi parmi les moyens acceptables et pertinents à mettre en oeuvre.
Le seul risque à agir et se regarder agir c’est éventuellement une bonne migraine.
Heureusement, à Surfrider, pour s’en remettre on n’a pas besoin de médicaments : une session active de surf, de kite, ou un beach volley, ou une ballade en bord de mer et un bon bol d’air iodé et c’est reparti.
Un pied devant l’autre.
Soi et l’autre. Ensemble.
Glossaire :
SFE : Surfrider Foundation Europe
RSO : Responsabilité Sociétale de l’Organisation
ONG : Organisation non Gouvernementale
DD : Développement Durable
QES : Qualité de l’eau et santé
ACC : Adaptation au changement climatique
ADT : Aménagement du territoire
TM : Transport Maritime
CARE : Conservation-Activism-Research-Education
GDC : Gardiens de la Côte
EEDD : Education à l’Environnement et au Développement Durable
IO : Initiatives Océanes
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