Tout au long du mois d’août, Surfrider Campus Biarritz a accueilli l’exposition « Orties Royales » du collectif Les Belles Histoires. Lors du vernissage le 1er août dernier, qui a par la même occasion inauguré le Festi Lasai, démonstration de skate et projection de leur film « Le skate moderne » furent au rendez-vous. L’occasion une nouvelle fois pour Campus de permettre la rencontre avec de jeunes artistes et partager avec eux leur vision de leur sport et leur rapport à l’environnement. Rencontre avec les membres de ce collectif bien sur leurs roulettes!
Qui êtes-vous ? Comment vous définiriez-vous ?
« On est des Périgourdins ! ». À travers le court-métrage « Le Skate Moderne », on représente All Boards Family, l’association de skateboard du coin qui nous suit depuis nos débuts en planche à roulette…, les collectifs LBH – Les Belles Histoires & Kloudbox (des “laboratoires“ de créations visuelles).
Pourquoi avoir choisi Surfrider pour exposer et présenter votre film ?
Cela fait depuis Avril qu’on expose un peu partout France. Notre seule exigence était d’exposer non pas dans des galeries privées, mais plus de collaborer avec des structures associatives, caritatives ou bien défendant une cause. En ce qui concerne le lien avec Surfrider c’est vraiment un rapport avec l’environnement de notre pratique. La différence, c’est la terre pour nous et l’océan pour vous ! On est fier de nos paysages périgourdins et on a voulu la sublimer avec notre pratique dans ce lieu atypique…Retrouver le calme, les odeurs, la simplicité, alléger le poids de la vie citadine!
Vous dites dans le film que votre rapport au skateboarding est passionnel, considérez-vous le skate comme une révélation ?
Plutôt comme un « art de vivre », une culture et bien entendu, une passion. Limite, ça rythme notre vie quotidienne! Par exemple, pour les plus jeunes d’entre nous, certains sont déscolarisés. L’association All Boards Family a permis de leur trouver des contrats civiques afin qu’ils puissent travailler dans des projets liés au skateboard. Il y a une forte solidarité qui s’est installée entre nous au fil des années depuis qu’on a tous mis des planches à roulette sous nos pieds.
Pensez-vous avoir un rapport au skate différent ? Mentalité, performance, etc… ?
Nous ne sommes pas les premiers à penser ça mais oui. On a tendance à prôner un skateboard indépendant et social. On est loin des compétitions et du business. On ne cherche pas à avoir des sponsors et à vivre du skateboard de cette manière. Au contraire, on vit du skateboard à travers les connections, rencontres que l’ont fait tous les jours, à chaque session, à chaque voyage. L’exposition « Orties Royales » et les projections du court-métrage nous ont permis de rencontrer de nouvelles personnes à Bordeaux, Lyon, Toulouse, Paris, Biarritz, etc… Toute cette “philosophie“, on a essayé de la communiquer un maximum, parce que c’est important pour nous d’expliquer aux gens la différence entre le fait de pousser, rouler sur son skate à fond sans trop savoir où aller, et de mettre un switch 360 flip nose wheeling filmé à l’iPhone…
Quels sont les origines du film?
C’est une idée du réalisateur, Antoine Besse. Il avait ce projet en tête depuis 2 ans, mais il n’avait pas trop le temps pour s’en occuper à cause de ces projets professionnels. Il a donc bossé sur le scénario de son côté pendant tout ce temps avant de nous en parler. Antoine est aussi un skater de Périgueux qui roulait avec nous depuis nos débuts, donc il sait comment on est. Quand il nous a expliqué qu’il voulait sortir le skateboard de son contexte urbain et le mettre dans la campagne… On a dit oui !
Le court-métrage a pour influence l’oeuvre de Raymond Depardon, « La Vie Moderne ». On peut reconnaître quelques plans et séquences qui font penser au documentaire. La musique de Gabriel Fauré fait également référence au film. Pour donner du cachet au court-métrage, il a fallu aussi travailler les costumes qu’on nous a prêtés. Il fallait des costumes du siècle dernier pour ne pas faire tâche avec la campagne. En ce qui concerne la narration, tous les propos sont authentiques, c’est bien les paroles et la réalité des personnages. À travers tous ces aspects, on parle bien d’un documentaire mélangé à de l’esthétique-clip.
Le skate est un sport urbain, votre style de skate est urbain, comment réagissez-vous quand on parle de décalage dans votre skate ? N’est-ce pas le propre du skate (street) de pouvoir être pratiqué dans les endroits les plus inattendus ?
Les réactions sont vraiment diverses et variées. Mais c’était vraiment le but de faire réagir les gens. On a eu un public beaucoup plus réceptif à travers cette vidéo qui se veut être grand public et non destiné seulement aux passionnés de glisse. Les gens (surtout les plus âgés) ont souvent une idée stéréotypée du skate, qui se veut être un sport de « vandales », avec des pratiquants qui traînent dans les rues. On pense que d’une certaine manière, on a pu dédiaboliser la pratique auprès de certains en la montrant d’un autre oeil. Sinon, après avoir vu la vidéo, Il y a des gens qui pensent vraiment qu’on va à la chasse le dimanche en skate… Ça nous fait bien rire en tout cas !
S’agit-il pour vous d’une autre réappropriation de votre espace par une pratique différente?
Je pense qu’on a réalisé ce projet pour rendre hommage. On vient tous de la campagne, on y a tous grandi, certains sont partis faire leurs études ou travailler ailleurs, mais on aime toujours y revenir pour l’inspiration. On a vraiment voulu dédié ce court-métrage à notre terroir, à la Dordogne et montrer au public qu’il ne faut pas avoir honte d’où on vient, et qu’il n’y a pas que des paysans, mais aussi des talents. C’est un paradoxe particulier, parce qu’on est aussi des représentants de la street culture à travers le skate… D’où le nom de l’exposition « Orties Royales », on fait un peu tâche au milieu des champs, comme une mauvaise herbe. Mais c’est ce contraste qui nous a construits et qui nous définit maintenant.