Avec Noël n’arrivent pas toujours de bonnes surprises. Le combat Gardien de la Côte « No Oil in Canary Islands » est loin d’être terminé. Depuis fin novembre, des forages pétroliers ont débuté aux Canaries, malgré la vive opposition du gouvernement régional, des habitants et des écologistes. Pourtant, il existe de forts arguments contre un projet qui avait amené le gouvernement canarien à déposer un recours auprès du Tribunal supérieur de justice espagnol. Un recours rejeté par les magistrats, se défendant que les risques encourus ne sont qu’ « hypothétiques », mais n’est-ce pas là la caractéristique de ce qu’on appelle un risque ? Sur ce pari de probabilité entre ceux qui font valoir raison, on pense étrangement à une citation d’Oscar Wilde : « Les gens qui font valoir la raison sont comme ceux qui cassent des cailloux sur les routes : ils vous couvrent de débris et de poussière. »
Mise à jour du 20 janvier 2015 : Le gouvernement espagnol et la compagnie pétrolière REPSOL ont annoncé la semaine passée l’abandon des prospections pétrolières dans les Canaries. En effet, à l’issue des premières prospections et du forage Sandia, n’ont pas été trouvés d’hydrocarbures en quantité et de qualité suffisantes pour rentabiliser la poursuite des opérations. Repsol a ainsi confirmé vendredi dernier que la compagnie ne demanderait pas de nouveaux permis ni n’utiliserait les autorisations déjà obtenues pour mener à bien de nouvelles prospections dans la zone.
David contre Goliath… Encore
Le derniers recours déposé par le gouvernement régional de l’archipel espagnol contre les prospections pétrolières en haute mer menées par le groupe Repsol a été rejeté mardi 9 novembre 2014 par Le Tribunal supérieur de justice en référé.
En effet la décision des juges s’expliquent par le fait que les autorisations données par le gouvernement pour chercher des hydrocarbures au large des îles Fuerteventura et Lanzarote respectent la législation en vigueur, notamment en termes de protection de l’environnement. De plus, les juges doutent aussi de l’impact négatif que pourraient avoir ces prospections sur le tourisme, principale ressource pour les habitants des sept îles de l’archipel des Canaries, jugeant qu’il « est complètement hypothétique et conséquence d’une situation d’urgence ou d’une catastrophe« . Le pétrole aux Canaries n’est pas une chose nouvelle, mais il avait été jugé jusque-là comme non exploitable car trop lourd. Dans un contexte où le pétrole se raréfie, la persévérance des compagnies pétrolières s’est encore illustrée, amenant le Gouvernement espagnol en mars 2012 à y autoriser des prospections pétrolières pour Repsol. Opposé depuis le début, le Gouvernement canarien faisait savoir sa position, et cherchait à organiser un référendum local sur le sujet. Le référendum fut suspendu par l’Etat espagnol qui, comme en France, a la compétence de l’énergie. L’opposition du Gouvernement canarien se défend néanmoins par des arguments forts, car s’il est contre, c’est surtout pour des questions d’eau.
Une dépendance prononcée à l’eau de mer
Les Canaries dépendent à 99% d’usines dessalant l’eau de mer pour les besoins nécessaire en eau, « pour l’eau potable mais aussi pour l’agriculture. S’il y a une fuite de pétrole nous devront arrêter nos usines de dessalement », selon Natalia Evora, conseillère environnement et transport du Cabildo de Fuerteventura.
Plusieurs recours ont été déposés, en vain, par le Gouvernement canarien et les écologistes auprès de Madrid et de l’union européenne. Cette agitation attira aussi la convoitise du Maroc qui voulait revendiquer ces mêmes puits. Dans cette affaire, l’Union Européenne ne s’était pas prononcé estimant que les puits concernaient des eaux en « dehors du domaine de compétence » de l’UE.
Une écologie qui fait grise mine
Des risques écologiques existent aussi, exposés depuis longtemps par l’opposition. La plus grande crainte reste l’hypothèse d’une fuite, une considération toujours à prendre. La gestion du risque se révèle parfois une science imprécise, on se souvient du désastre écologique sans précédent avec l’exemple de la plateforme pétrolière DeepWater Horizon, dans le Golfe du Mexique, qui avait explosé le 20 avril 2010 produisant une marée noire de grande envergure avec une estimation moyenne de 4,9 millions de barils soit 780 millions de litres répandus.
Mais d’autres dangers apparaissent aussi dès le début des prospections, comme l’explique Pédro Hernandez du collectif environnemental El Guincho : « Ce n’est pas seulement le risque de marée noire qui nous inquiète mais aussi le bruit que font les recherches pétrolières avec les ondes sismiques. Cela peut perturber les cétacés« .
A cela s’ajoute les dangers qui pèsent sur le tourisme, une industrie qui emploie 80% de la population locale. Chaque année, les Canaries accueillent autant de touristes que d’habitants, avec l’inquiétude qu’une nature défigurée pourrait nuire au tourisme.
Enfin, n’oublions pas l’objectif initial. Il ‘agit de pétrole et donc, in fine, de rejets dans l’atmosphère de gaz à effets de serre. Alors que l’urgence climatique invite toutes les nations du monde à tenter de s’engager dans la lutte contre le réchauffement climatique, comme ce fut encore le cas à Lima début décembre, l’Espagne se lance donc dans un projet aggravant la situation. A force de frilosité étatique, la goutte de pétrole finira par faire déborder le vase de la contestation. La mobilisation canarienne illustre la prise de conscience nécessaire. Ne la laissons pas partir en fumée.
Un heureux nommé Repsol
Repsol de son côté joue la carte économique dans une Espagne qui importe 80% de son energie, en insistant sur les retombées économiques pour les Canaries et l’Espagne, si des hydrocarbures étaient effectivement découverts. En effet Repsol semble bien lancé, notamment avec un PDG nommé en 2012 «PDG de l’année » aux Platts Global Energy Awards à New York, une récompense aujourd’hui détournée par le collectif No Oil in Canary Islands (combat GDC), qui le nomme « dirigeant le plus toxique de l’année »
Pour plus d’infos sur ce combat, rendez-vous sur le site des Gardiens de la Côte.
Alban Derouet, Rédacteur environnement
Mise à jour du 20 janvier 2015 : Le gouvernement espagnol et la compagnie pétrolière REPSOL ont annoncé la semaine passée l’abandon des prospections pétrolières dans les Canaries. En effet, à l’issue des premières prospections et du forage Sandia, n’ont pas été trouvés d’hydrocarbures en quantité et de qualité suffisantes pour rentabiliser la poursuite des opérations. Repsol a ainsi confirmé vendredi dernier que la compagnie ne demanderait pas de nouveaux permis ni n’utiliserait les autorisations déjà obtenues pour mener à bien de nouvelles prospections dans la zone.
Le collectif Save Canarias et en particulier les autorités canariennes cherchent désormais à évaluer les possibles impacts qu’ont occasionnés ces prospections aujourd’hui abandonnées. Le collectif souhaite s’assurer de l’arrêt définitif des prospections et entend garantir la protection du milieu en obtenant sa reconnaissance comme lieu d’importance communautaire (LIC) et comme Sanctuaire International de Cétacés (la zone accueille une densité exceptionnelle de baleines et dauphins)