Le 21 octobre, le tribunal correctionnel de Marseille a condamné le commandant philippin du vraquier Seaforce à une lourde amende pour avoir utilisé illégalement son scrubber à boucle ouverte dans l’enceinte du port de Fos-sur-Mer : un dispositif pour nettoyer les cheminées des navires dont le contenu est rejeté en mer. Surfrider Foundation se réjouit de cette victoire importante contre la pollution marine.
C’est une première en France. Le 21 octobre, le tribunal correctionnel de Marseille a condamné le commandant du vraquier Seaforce à une amende de 50 000 euros pour avoir utilisé illégalement son scrubber à boucle ouverte dans l’enceinte du port de Fos-sur-Mer : un filtre installé dans les cheminées des navires pour nettoyer l’air et réduire les pollutions atmosphériques , mais dont le contenu est rejeté en mer et pollue les eaux.
Le capitaine devra aussi verser 8 000 euros à Surfrider Foundation et aux autres associations qui se sont portées parties civiles dans ce procès au titre du préjudice moral subi : nos ami·es de France Nature environnement (FNE) et de la Ligue de protection des oiseaux (LPO) en Provence-Alpes-Côte d’Azur, ainsi que l’Association pour la protection des animaux sauvages, l’Aspas.
“Nous espérons que cette première condamnation enverra à un signal fort et dissuasif aux capitaines et aux armateur·ices, qui doivent prendre conscience qu’ils ne peuvent plus continuer à contourner la réglementation en toute impunité”, commente Cristina Barreau, juriste maritime chez Surfrider Foundation.
Des rejets d’eau polluée par des hydrocarbures
Pour comprendre cette affaire, il faut revenir un peu plus d’un an et demi en arrière. Le 19 mars 2023, le navire Seaforce, un vraquier affrété par une compagnie grecque et battant pavillon de Malte, accoste au Port de Fos-Sur-Mer afin de décharger du charbon.
Quelques jours plus tard, le centre de sécurité découvre lors d’un contrôle que le navire a utilisé un scrubber en boucle ouverte dans l’enceinte portuaire, à moins de 3 milles marins de la terre la plus proche, ce qui est strictement interdit en France depuis le 1er janvier 2022. Plus précisément, les « scrubbers » doivent fonctionner en système fermé lorsque les bateaux se trouvent à cette distance des côtes. Et ce, afin de stocker et traiter les résidus de fumées chargées de métaux lourds en évitant de les rejeter en mer près des côtes.
“Les scrubbers à boucle ouverte permettent aux capitaines et aux armateurs de continuer à utiliser du fioul lourd, un carburant peu cher mais extrêmement polluant. Au lieu de lutter véritablement contre la pollution maritime, on l’enfouit sous les mers”, déplore Cristina Barreau.
Une menace évidente pour la biodiversité
Dans leur jugement rendu le 21 octobre, le tribunal correctionnel de Marseille a estimé que la taille du navire -un vraquier de 400 tonneaux – constituait “une circonstance aggravante” et que ses rejets polluants étaient une menace évidente pour la biodiversité.
Fort de 23 ans d’expérience de la navigation, “le capitaine aurait dû vérifier que son ordre de faire cesser les scrubbers, comme il l’avait indiqué, avait bien été suivi d’effet”, ont tranché les juges.
Cette première jurisprudence va dans le bon sens, mais la victoire n’est pas encore acquise. L’avocate du capitaine, Helen Mc Lean, a d’ores et déjà fait savoir qu’elle ferait appel de la décision.
“Nous espérons que la Cour d’appel d’Aix en Provence confirmera le jugement du tribunal correctionnel de Marseille afin d’encourager tous·tes les capitaines et les armateurs à prendre leurs responsabilités pour lutter contre la pollution des mers et des océans”, conclut Cristina Barreau.