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Carbone bleu : protéger & restaurer les écosystèmes pour un futur durable

🕒 Temps de lecture estimé : 10 minutes

Les écosystèmes de carbone bleu sont des alliés de premier plan dans l’atténuation du changement climatique, l’adaptation des littoraux et la résilience des communautés côtières.
Si leur rôle dans la séquestration du carbone est très souvent mis en avant, leur importance va bien au-delà de cet aspect. Ils représentent des réservoirs de biodiversité, servant de nurseries, d’habitats critiques ou de zones de reproduction et d’alimentation pour de nombreuses espèces de poissons et d’oiseaux.
Ils sont également un élément économique majeur pour les communautés locales. Ils soutiennent la pêche, un secteur économique crucial pour de nombreuses communautés côtières.

Malgré ces multiples avantages, ces écosystèmes sont gravement menacés. La pollution, le trafic et le mouillage des bateaux de plaisance, l’extension des terres agricoles, l’aquaculture, les aménagements touristiques et urbains, ainsi que le changement climatique, sont autant de pressions qui ont conduit à une perte considérable de leur superficie.
Face à cette situation alarmante, il est impératif de préserver ces écosystèmes, de les protéger et, lorsque cela est nécessaire, de les restaurer.
Cependant, ces efforts doivent être réalisés de manière réfléchie et rigoureuse pour maximiser leur efficacité.

La reconnaissance de l’importance des écosystèmes de carbone bleu à l’échelle mondiale a conduit à la multiplication des initiatives visant à leur protection, leur préservation ou leur restauration.
L’une des plus importantes est la Convention de Ramsar, un traité international qui prône la conservation et l’utilisation rationnelle des zones humides, dont les mangroves, les prés salés et les herbiers marins font partie.
Cette convention encourage la coopération internationale pour la gestion des zones humides transfrontalières et la protection des espèces partagées.

D’autres initiatives, telles que celle du Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) et l’initiative « Carbone Bleu » se concentrent, quant à elles, sur la science de la conservation, la politique et la gestion des écosystèmes de carbone bleu à l’échelle mondiale.

Les écosystèmes de carbone bleu font, depuis plusieurs années maintenant, l’objet de nombreux projets de préservation, de protection et de restauration.

Les mangroves, en particulier, sont au cœur de nombreux efforts de restauration à l’échelle mondiale.
La Global Mangrove Alliance, une coalition regroupant des ONG, des gouvernements, des entreprises et des scientifiques, œuvre pour stopper la perte nette de mangroves et restaurer les mangroves dégradées.
Selon cette alliance, sur les 11 700 km² de mangroves perdus depuis 1996, environ 8 183 km² sont considérés comme restaurables.

La restauration des mangroves peut se faire de deux manières principales, par colonisation naturelle ou par plantation :

  • La colonisation naturelle, qui consiste à restaurer les conditions environnementales nécessaires pour permettre aux mangroves de se régénérer naturellement, est souvent privilégiée.
  • La plantation. Pouvant être utilisée en complément d’autres actions de restauration, telles que le nettoyage des sites, la dépollution ou le retrait des remblais.

Il est important de noter que 80 % des efforts de plantation échouent, soulignant la nécessité d’adopter des approches plus écologiques et de travailler en collaboration étroite avec les communautés locales.

Pour suivre l’évolution des mangroves dans le monde, le projet Global Mangrove Watch a été mis en place.
Il utilise des technologies de télédétection pour surveiller et évaluer la santé des mangroves à l’échelle mondiale, fournissant des données cruciales pour orienter les efforts de conservation et de restauration.

En France, plusieurs projets de restauration des herbiers marins sont en cours, notamment dans le bassin d’Arcachon et en Méditerranée.

À Arcachon, en 2019, le Parc naturel marin du Bassin a mis en place une commission dédiée à l’élaboration d’une stratégie à long terme pour la restauration des zostères, impliquant divers acteurs locaux.
Le Parc soutient également aujourd’hui des projets de suivi de la recolonisation des herbiers après la réhabilitation des friches ostréicoles et teste des herbiers artificiels pour améliorer les conditions de recolonisation.
Une collaboration avec les ostréiculteurs locaux a également été initiée pour comprendre les interactions entre leurs activités et les herbiers marins.

Bien que des mesures aient été prises pour protéger les herbiers de Posidonie, en Méditerranée, ceux-ci restent soumis à de fortes pressions anthropiques, entraînant une régression de leur superficie.
La protection de ces herbiers est essentielle, mais dans certains cas, lorsque les activités humaines ont causé des dommages irréversibles, des opérations de restauration sont nécessaires et peuvent prendre différentes formes : repiquage de boutures d’herbiers sains ou encore collecte puis semis de graines pour restaurer les herbiers (projets menés par GIS Posidonie).

Les prés salés, également appelés marais intertidaux, jouent un rôle crucial dans la protection des côtes contre l’érosion et les submersions marines, tout en offrant des habitats essentiels pour la faune et la flore.
En France, des projets de dépoldérisation, notamment dans la Baie d’Authie, sont à l’étude.
Cette zone, située à la frontière littorale entre le Pas-de-Calais et la Somme, a été fortement impactée par l’extension des terres agricoles et l’érosion, entraînant une perte significative de la superficie des prés salés.
Dans le cadre de son projet de restauration, plusieurs aménagements sont envisagés, dont la dépoldérisation de certaines parties de l’estuaire de l’Authie.
L’objectif est de lutter contre les inondations et les submersions littorales causées par des débits fluviaux élevés et de forts coefficients de marée. À terme, cette transformation permettra de restaurer des zones humides riches en biodiversité, tout en offrant une protection forte contre l’érosion et les tempêtes.

Il est important de souligner que, dans certains cas, il est plus économique et écologique de protéger les écosystèmes existants plutôt que de les restaurer après leur dégradation.
La restauration des écosystèmes, bien que bénéfique, peut être coûteuse et complexe, et les résultats ne sont pas toujours garantis.
Par conséquent, les efforts doivent être orientés autant que possible vers la prévention de la dégradation des écosystèmes de carbone bleu, en adoptant des pratiques de gestion durable et en réduisant les pressions anthropiques qui les menacent.

De la nécessité de mettre en place des projets durables et inclusifs de restauration des écosystèmes de carbone bleu

Les écosystèmes de carbone bleu ne doivent pas être perçus comme une solution miracle au changement climatique.
Bien qu’ils soient des puits de carbone, leur protection et leur restauration ne doivent pas être vues comme un substitut à la réduction des émissions de gaz à effet de serre.
De plus, les projets de restauration doivent être basés sur une compréhension approfondie des écosystèmes locaux, et non sur des solutions simplistes ou généralisées.

Pour garantir la réussite des projets de protection et de restauration des écosystèmes de carbone bleu, il est crucial d’adopter une approche holistique et collaborative. Les décideurs, les gestionnaires, les scientifiques, et les communautés locales doivent travailler ensemble pour développer des solutions durables et adaptées aux contextes locaux. Les projets doivent être bien conçus de sorte de préserver les nombreux services écosystémiques qu’ils procurent.

L’implication des communautés locales est essentielle pour le succès des projets de restauration.
Ces communautés sont souvent les premières à bénéficier des services écologiques et économiques offerts par les écosystèmes de carbone bleu, mais elles sont aussi les plus vulnérables aux impacts de leur dégradation. En intégrant les savoirs traditionnels et en garantissant la participation active des communautés, les projets de restauration peuvent être mieux adaptés aux réalités locales et obtenir un soutien plus large.